Nous écrivions en 2007....

Depuis, la DDE, une champignonnière, ont occupé ces endroits. Un groupement sportif y a élu domicile, ainsi qu'un club nautique. L'armée d'occupation creusa des galeries ; de nombreux lits y furent scellés mais le destin ne permit pas l'extension désirée. Les souterrains courent vers la Sous-préfecture ; surface : un hectare et demi. Certains garderons leurs mystères, pour différentes raisons. Ce billet vous offre, tout de même, un diaporama assez visionnel. Un homme à saluer : l'ingénieur hydrologue BLAVEAU. Il découvrit des sources d'eau potable en Porstrein. Cet élément de vie a amplifié la volonté de construire le port.

Françoise est née rue de Madagascar. Elle connait bigrement ces excavations... Jeux d'enfants, production de petits rosés (parfois grands comme une assiette à dessert). Commençons par là... Honneur aux dames !


Puis, décidé, je suis allé avec Michel, Jean-Marie, Aurélien. Et nous avons vu... entendu. Suivez notre itinéraire en cette atmosphère chargée d'humidité, de souvenirs lourds, de lueurs nébuleuses. La source limpide nous rassure. Un petit tressaillement me parcourt car, enfin, il y a... il y a un... il y a un temps... Ce fût un abîme !


Stéphane parle, sait, raconte. Une certaine frénésie l'emporte vers les réalités humaines. Très posé dans le propos il apporte son complément d'informations. Les murailles qui ont vécues doivent opiner. Instants très forts d'une page en PortD.







Dans le silence une musique accompagne les bruissements. Nos pas résonnent jusqu'aux voûtes artificielles ; nos pas cherchent les traces du passé. Un nouveau regard, soudain ! Nous sommes revenus en l'an 2007. La roche stigmatisée est toujours là accompagnée des couches de béton indestructible. DE NOUVEAUX ACQUIS HISTORIQUES VIENDRONT COMPLETER CE THEME. Nous les mettrons en ligne. Mais si parmi vous il y en a qui... Ne pas hésiter.

Vidéo : Jean-Marie Grall. Photos : Michel Poulain et Yffic Dornic. interviews : Yffic Dornic accompagné de Françoise, Stéphane, René, Jean-Louis, Aurélien. Musique du Duo Diamine. Le 16 octobre 2007 à PortDe.

Nous ajoutons en ce 25 septembre 2013... > Le souterrain aux multiples usages

Les falaises bordant le port de commerce recèlent un étonnant sous-sol quasiment méconnu du grand public situé à l'à-pic des remparts, près de La Carène, salle des musiques actuelles, rue Jean-Marie Le Bris à Brest. Ce souterrain comprend 3 tunnels avec 600 mètres de galeries, mesure un hectare et demi dans sa partie utilisée à ce jour par une association sportive brestoise et comporte trois entrées visibles. L'origine de ce souterrain demeure plus ou moins certaine. Cependant, la percée du sous-sol est semble-t-il liée à la volonté des armées d'occupation allemande de forer les roches afin d'y agrandir un dispensaire français sous l'égide d'experts sanitaires à partir de 1940/1941. Le mot «hôpital» fut alors employé. Cette période sombre du site est quasi passée sous silence par les historiens1. Les habitants du quartier, dit de Madagascar, se souviennent quant à eux de l'intense activité souterraine. L'armée américaine en prend ensuite le contrôle courant 1944 et l'utilise à usage de camps de prisonniers allemands. L'action de soins y demeure présente. Depuis 1995, ce souterrain est investi par une association sportive municipale brestoise. Il a tour à tour, depuis son occupation par l'armée américaine fait l'objet d'emploi à visée professionnelle (stockage de matériel), commerciale (la champignonnière) et enfin de loisirs.

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Pour votre information nous vous signalons le site très élaboré http://www.cahiersdeliroise.org.

Le souterrain aux multiples usages




I - A l'origine, la source

L'importance des sources venant se déverser au pied des falaises a joué un rôle déterminant dans le choix de l'anse de Porstrein en devenir du nouveau port de commerce. Pour mémoire, des fours à chaux, un abattoir, une tannerie, des lavoirs, des petits chantiers navals ainsi que des maisons de pêcheurs furent bâtis sous une carrière devenue depuis le Cours Dajot et ceci postérieurement au décret instituant la réalisation du port. Prosper Jean Levot2 (1801/1878), historien-bibliothécaire, confirme la présence de ces réserves d'eau potable dans l'un des nombreux ouvrages dont il est l'auteur. Une photo d'une source très active sortant de la falaise face à la rue de Madagascar illustre ces propos. Avant l'occupation allemande, les autorités françaises avaient pour projet d'implanter dans ces tunnels un dispensaire. Les responsables militaires de la Marine avaient sans doute pressenti l'inéluctable conflit lors de la prise de pouvoir par Hitler en août 1934 après avoir été nommé chancelier en janvier 1933. Aussi ont-ils privilégié des espaces souterrains adaptés à une probable situation de guerre. Revenons sur l'origine de ces labyrinthes. Des cavités naturelles ont sans nul doute incité aux premiers travaux d'aménagement. Vers 1860, le Port de Commerce quitte la Penfeld et devient, dans l’ancienne anse de Porstrein, le Port Napoléon. Les tunnels offrent par exemple, un lieu aisé de stockage. La preuve en serait faite par l'existence d'une grotte assez profonde dans laquelle l'ingénieur hydrologue Monsieur de Blaveau1 installa une aiguade (provision d'eau douce pour un navire ou alors le lieu où se fait l'approvisionnement) indispensable aux navires du royaume et aux boulangeries fournissant la marine dans les années 1785/1788. Aujourd'hui, la source déverse toujours un débit impressionnant d'eau limpide. Nous en avons dégusté un verre lors d'une visite dans ce souterrain. Lors de la réalisation du port de commerce, il apparaît que des cryptes ont dû être remblayées pour mise à niveau avec les nouveaux terrains conquis sur la mer. Nous en donnons la raison plus loin lorsque nous relatons l'existence d'une ancienne champignonnière. Ce souterrain constitue certainement un point d'appui stratégique des troupes allemandes en juin 1940 pour leurs installations sanitaires puisque les ouvrages déjà en place permettent à la Kriegsmarine d'en tirer avantage. Il est évident que dans le contexte du IIIe Reich, pour parer à toute situation de défaite, les allemands entreprirent des travaux d'agrandissements surdimensionnés2. Ils creusèrent de nouvelles galeries tout autour de la fameuse source indispensable à la survie des huit cent personnes, malades, soignants ou gardiens des éventuels prisonniers français ou alliés. Les allemands firent appel à la main d’œuvre française pour réaliser ces travaux. Il est surprenant de constater dans le même lieu la mise en œuvre de deux conceptions d'architecture. En effet, des ouvrages en béton voisinent avec des maçonneries de pierres. Ceci est visible dans les tunnels du Port de commerce comme dans beaucoup d'autres endroits. La durée de la guerre, malgré la détermination du régime hitlérien, reste incertaine. Les occupants développent l'hôpital sur près de deux hectares avec une quantité de lits assez impressionnante: de 500 minimum à 800 selon nos sources. Des lits superposés étaient fixés par deux aux parois de l'ensemble des murs de cet immense espace. Des salles d'opérations et de soins étaient également prévues. L'humidité ambiante n'était pas favorable aux conditions de soins en période de guerre. C'est davantage par stratégie militaire que les allemands ont opté pour ce souterrain. Des batteries de canons très dissuasives placées aux trois entrées du souterrain en témoignent. Il est stupéfiant de voir l'étendue des travaux entrepris dans des conditions de conflits avec le matériel existant à l'époque. Pour conclure, les tunnels s'étendent sous la falaise vers la sous-préfecture... Les allemands désiraient creuser jusqu'en dessous de la gare SNCF et créer un nouveau tunnel qui aurait rejoint celui venant de l'hôpital Ponchelet. Il faut admettre qu'il s'agissait d'un plan titanesque réalisé grâce à une science du bétonnage, matériau très exigeant dont la démolition s'avère difficile à gérer.

II – Les variantes occupations du souterrain

Au départ des troupes alliées après la guerre, la Direction Départementale de l’Équipement (DDE) occupe ces souterrains. Les lieux étant fort humides, elle les abandonne, les matériels en souffrant et devenant en partie inutilisables. Une période de no man's land dont on ne connaît pas la durée exacte sans s'ensuivit. Ces labyrinthes restèrent inoccupés et tombèrent peu à peu dans l'oubli d'autant que des bâtiments d'entreprise en cachaient l'accès. Puis, la mairie de Brest s’y intéresse et en offre la jouissance pour partie à un groupement sportif et une autre, à un club nautique. Ces associations se sont installées depuis sur le nouveau port de plaisance du Moulin-Blanc. Des années passèrent encore dans l'abandon. Les conditions idéales étaient réunies dans ces tunnels sombres et humides pour y faire pousser des champignons ! Une champignonnière est créée au début des années 1980 sur une idée de natifs de la rue de Madagascar. Il faut savoir qu'en culottes courtes, ils jouaient dans ces souterrains. La tâche s'est cependant avérée des plus ardue... Imaginez ! Eclairés de façon sûrement sommaire, il fallut non seulement démonter environ 500 lits fixés aux parois des murs de béton ou de pierres, mais aussi faire face, dans une atmosphère bien macabre, à la découverte d'ossements humains. Une fois les tunnels débarrassés des traces de leur occupation passée, la production de champignons dits de Paris3, commença à prospérer. Les clients se firent assez nombreux, surtout parmi les restaurateurs enclins à utiliser des produits locaux originaux. Quel souvenir d'admirer certains de ces spécimens de la taille d'une assiette ! Un véritable régal lorsqu'on les cuisinait d'après la recette des deux producteurs. Il est évident que le format de ces champignons était exceptionnel. Quelle en était la raison ? Les exploitants de la champignonnière nous ont appris que lors des fortes marées, l'eau salée s'infiltrait dans les lieux et augmentait non seulement le rendement mais la taille de certains légumes. Malheureusement, la surproduction et l'exigence des producteurs de champignons labellisés de la région parisienne ont eu raison de cette belle aventure. Une association sportive municipale brestoise en 1995 s'est ensuite installée pour y exercer une discipline secrète, se prêtant très bien à l'endroit : le tir à balles réelles. Dans ce club4, les adhérents, amateurs passionnés, se réunissent chaque semaine pour se défier dans le meilleur esprit. Des services d'état délèguent leurs tireurs d'élite qui trouvent en ce lieu des conditions favorables. Leur terrain de tirs est composé de trois grands tunnels avec deux allées transversales permettant l'entrée et la sortie de ce souterrain. Seule la partie ouest ne leur est pas allouée car elle sert d'entrepôt aux services techniques de la ville. Des murs en moellons en interdisent l'accès ainsi que l'abord du tunnel permettant de rejoindre celui de l'hôpital Ponchelet, ce dernier s'avérant très dangereux. Les responsables de ce club nous ont relaté l'anecdote suivante : «Nous avons dû terminer le démontage des lits restants. Nous avons découvert des alliances qui ont semble-t-il glissé des doigts amaigris des occupants de l'époque dans un espace qui devait être un lieu d'aisances.» A l'occasion des journées du patrimoine, en cette année 2013, le public a pu remarquer des installations électriques ou autres datant de la seconde guerre mondiale et la source toujours présente lui aura peut-être murmuré un secret du passé...

Ce 25 septembre 2013 au port de commerce de Brest. Texte élaboré par Yffic Dornic avec les contributions de Chantal Houthemann et de Laurence Salaün.

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Conclusion:

Nous espérons vous avoir apporté quelques éclairages intéressants sur ce souterrain méconnu de la région brestoise. Bien sûr, il va sans dire que nous ne détenons pas tous les éléments et cela peut avoir pour conséquence certaines petites inexactitudes ou omissions. S'il s'avère que certains d'entre vous détiennent un complément d'information, nous serions heureux d'ajouter votre contribution à cette recherche de mémoire sur le patrimoine de la ville du Ponant.

Merci à vous tous qui nous avez suivi dans cette manne: Les archives des Cahiers de l'Iroise, Les archives Stéphane Le Lann, les archives Fort Montbarrey, les archives Prosper Levot, Gérard Cissé, Chantal Houthemann, Laurence Salaün. Textes de Yffic Dornic.