En décembre 2006 les engins de terrassement commencent à extraire une partie originelle du radier, ce sur une hauteur de 2 mètres environ... En 2008 le site est quelque peu en sommeil, suite à quelques petits aléas et retards (comme dans tout gros chantier). Alors en attendant voici les plans fixant les restructurations envisagées. Puis c'est le début des travaux sur le terre-plein destiné à la toute nouvelle grue. L'installation des rails sur une véritable assise en béton (Rappelons que nous sommes sur du remblai) nous promet-elle une livraison prochaine de la structure ?

Forme 1

Élargissement forme 1

Restructuration forme 1

Historique des formes de radoub.

Jusqu'en 1665 l'entretien des navires se réalisait de façon archaïque et dommageable. En effet, après le déchargement de tout ou partie de son contenant , suivi du démâtage puis du calfeutrage des ouvertures le bateau était couché sur un de ses flancs (par de multiples méthodes assez complexes). Une fois terminé le carénage l'on répétait l'opération pour l'autre bord. Cela s'appelait l'abattage et s'effectuait sur des plages près des ports. Il va, sans dire, que la structure du vaisseau travaillait obligatoirement lors de cet échouage. Alors? L'idée de construire des formes de radoub s'avéra judicieuse. Posé debout sur des fonds munis de tins puis attiné par bâbord et tribord le navire se travaillait lors de ses mises à sec par le faite du jeu des marées . Nous avons un petit exemple de ces structures au 1er bassin du port de commerce à Brest (voir photos de l'Ebba Victor). Seuls les caboteurs de faibles dimensions ou les chalutiers la pratique. Puis vinrent les bassins en maçonnerie pourvus d'écluses et de pompes à chapelets. La plus ancienne forme de radoub d'Europe est celle de Rochefort datant de 1671 et améliorant le système anglais. Elle est munie d'un radier en dur (fond de la cale sèche très sollicité par la poussée d'Archimède) et de ses deux bajoyers (parois parallèles au navire et devant être solides pour résister à la pression des terrains meubles le plus souvent gorgés d'eau). Un batardeau (gros talus) fût nécessaire pour construire cette «Vieille forme». En 1688 un bassin avec ses deux formes (une inférieure et une supérieure) voit le jour.. à Rochefort. Cet ouvrage cause bien des soucis aux têtes pensantes de la marine. Découvrez sur Wikipédia (origine des formes de radoub) un dossier très élaboré.

En 1778 l'ingénieur Antoine installe un bateau-porte en bois de sa conception sur la cale sèche de Toulon. Bingo! Dans l'arsenal de Brest Choquet de Lindu dirige les travaux des trois formes de Pontaniou (1742 à 1757) pour «La Royale». Le 22 février 1913 c'est l'inauguration de la forme 1 au port de commerce à Brest. Voilà un bref résumé sur l'évolution des sites de la réparation navale.

La «Forme 1» dans sa nouvelle topographie suite à une restructuration.

Nous avons présenté par l'écrit et le parler cette « Vieille Dame » dans les billets du 27 septembre 2007 et du 25 février 2008.

Aujourd'hui cernons, au mieux, les refontes qui furent nécessaires à une meilleure exploitation. Un peu barbares, pour nous tous, les termes du milieu de la réparation navale vont, tout de même, être digérés si l'attention de chacun est volontaire.

Pourquoi des travaux sur ce site classé ?

La carène des bateaux a changé. Le profil en V de la coque sous l'eau est devenu plus à plat et la largeur des navires y a gagné. La forme 1 datant de 1913 était restée dans son moulage d'origine malgré ses diverses reconstructions par suite de guerres ou autres volontés. Seules des petites unités y faisaient escale. Le carnet de commande se dégarnissait d'année en année. Classée monument historique il fallût réfléchir à un élargissement afin de réutilisation rentable respectant son aspect avec des paliers formant comme un énorme escalier.

Plans et phasage des travaux.

Sur la volonté et le partenariat de la Communauté Européenne, du Conseil Régional de Bretagne, de la Direction Départementale du Finistère, de la Chambre de Commerce et d'Industrie de Brest un cahier des charges volontariste définit les travaux suivants...

La réalisation du gros œuvre fut confié à l'entreprise Groupement Solétanche Bacly/Quille sur le calendrier qui suit.

  • Phase 1 : A partir de la plateforme arrière du bajoyer à reculer construction d'une paroi au coulis armé.
  • Phase 2 : Vérification du niveau bas de la nappe phréatique suivi d'un terrassement du radier (profondeur: 2mètres).
  • Phase 3 : Démolition supérieur du bajoyer tribord de la cale (côté droit en regardant à partir de l'arrière vers la porte- bateau). Réalisation de 550 ancrages en radier par injections de coulis cimenteux.
  • Phase 4 : Réalisation d'une paroi moulée et d'un poste de perforation.
  • Phase 5 : Terrassement puis réalisation d'une plateforme pour pose de tirants d'ancrage (formée d'une couche de sable).
  • Phase 6 : Pose de ces tirants et remblayage jusqu'au niveau de la paroi moulée. Exécution du ferraillage du radier et bétonnage de 7 plots.
  • Phase 7 : Réalisation de la rehausse en béton armé.
  • Phase 8 : Mise en place de poutres de halage en bâbord et tribord
  • Phase 9 : Démolition complète du bajoyer épais de 6,50 m à sa base (4 mois).
  • Phase 10 : Mise en place d'une voie pour grue Kranbau Eberswalde et fixation des ancrages au pied du bajoyer cité plus haut. Finition du ferraillage puis bétonnage du radier.

(sources du site www.soffons.org)


Le montage de la Kranbau/Esberwald a été réalisé par des spécialistes germaniques.du groupe allemand ayant vendu cette grue. Par la présentation ci-dessous vous aurez une information assez précise sur elle-même et sur le déroulement de sa mise en place.

La grue sur rails - KRANBAU/EBERSWALDE

DESCRIPTIF

Son poids est de 330 tonnes, sa hauteur hors-tout avoisine les 45 mètres, sa flèche mesure 50 mètres, sa cabine d'exécution se situe à 23 mètres du sol (très bonne visibilité).

CARACTERISTIQUES

Mobilité par énergie électrique (câble au diamètre de 28 m/m sous gaine protectrice). Communication terre/cabine par VHF. Crochet de saisie muni de deux brins en acier. Rotation en charge 0,7 U/mn. Relevage au crochet 30 mètres/mn. Traduction en km/h: 1,8.

Quelques exemples de charge en flèche :

Son revêtement est de couleurs jaune vif et bleu foncé. Le grutier est un permanent spécialisé de la CCI portuaire.

Source informations: Chambre de Commerce et d'Industrie du port de Brest.


La forme va être livrée sous peu mais après quelques finitions, quelques livraisons. Des pierres venant du site classé sont recollées au bajoyer; Elles furent déposées afin de ne pas les briser lors de la venue des engins de terrassement et autres bétonnages Les tins en ferraille sont remisés... Les 222 Modernes les remplacent. Mais ce Wong Sound en serait-il un ? Une vidéo nous présente l'excellent résultat recherché... et réussi.

Les tins de la forme forme 1

La cale sèche se trouvant élargie il a fallu penser à un renouvellement des tins puisque l'usure des anciens et leur nombre réduit obligeait à leur remplacement.

Tout d'abord qu'est-ce un tin? Un gros morceau de bois ressemblant à un billot en chêne surmontant une base en béton ou de métal (cerclé et doté de ferrures verticales voir de croisillons). Sa taille varie selon les besoins des travaux sous le navire. En effet cette pièce mise à plat sur le radier supporte le bâtiment lors de la mise à sec de la forme. Il s'aligne sur 2 files avec d'autres afin d'épouser l'architecture de la quille.

En forme 1 les tins (bois + ferraile en assise) mesuraient 1,40m pour un poids de 2,2 tonnes. Les nouveaux passent à 1,50m et pèsent 2,8 tonnes. Dans les grandes cales sèches situées plus à l'est recevant les grosses unités le gabarit est de 1,80m et frôle les 8 tonnes.

Le positionnement de ces tins se définit par une étude précise des plans versés par l'armateur. L'opération est délicate et demande une maîtrise affinée (Brest a des compétents de haut niveau).Il va de soi que lors du vidage de la forme de radoub ces billots accueillent cette lourde charge dans des conditions optimales de sécurité. La manutention se fait avec des engins de levage.

Les vieux tins étaient quelque peu difformes pour avoir tant servi. De plus leur nombre insuffisant 180 pour la cale remodelée les mis au rencart. Les 222 Modernes qui les ont remplacé servent depuis le deuxième tiers d'août 2009. Le bois de ces tins s'écrase légèrement et par élasticité sous la charge.


Les blocs de granit en sus vont être stockés, les dernières touches vont parfaire ce lieu, les tins vont trouver leur place, les pompes vont s'actionner, le bateau-porte va être enlevé, le Thalassa va entrer et la cale sèche se refermer afin que les hommes puissent le travailler. Une dernière vidéo pour sceller ces derniers instants du façonnage de notre forme 1. Allez sur la page 4 afin de suivre la passage du M-N Eider dans ce site rénové... puis sa sortie vers les ports du monde.. Texte 4.


Je tiens à remercier très vivement: la CCI du port de Brest, la DDE Finistère , Philippe Breton l'extraordinaire informateur du mécanisme de la réparation navale civile, l'humour des "Carabosse" lié à Wong Sound, Laurent Dupuy pour sa disponibilité photographique. Merci Erwan Guéguéniat pour ton aide logistique et ton savoir maritime. Les textes, les photos les interviews, les vidéos sont de Yffic Dornic. Yffic Cloarec toujours aussi présent est à saluer en ce 27 octobre 2009.