Cheminons dans les périodes de paix comprises entre 1900 et 1939. Les cartes postales et photos (dont celle titrée "Port de comerce Brest " d'un GI américain + celle des "Rampes du port" avec l'ancienne passerelle) nous communiquent l'ampleur du phénomène ferroviaire. Il faut savoir que telle une toile d'araignée le rail tissait, dans tous les recoins de notre portde, un réseau étudié autant que performant.

Ces trains de nos ports brestois

Nous savons que la première voie date de novembre 1866 afin de desservir le militaire et le commercial. Des besoins d'expansion se firent sentir et les échanges très tendus entre les élus, les représentants de l'état et la Compagnie de l'Ouest firent que le réseau portuaire fut longtemps ad-minima. Une seconde voie vit le jour en 1906. Puis le génie de la marine projeta vers 1913 des lignes supplémentaires sur ce que l'on dénomme « Parc à Chaînes ».Il fallut attendre fin 1917 pour que ce plan soit une réalité... au détriment du magnifique square alors en place. Et ce sont les américains qui montèrent l'ensemble de 12km pour acheminer hommes de troupe et matériel. Sept à huit convois pouvaient venir jusqu'au terre-plein. Ensuite des voies sillonnèrent par aiguillages interposés la totalité des quais. Que pouvaient emmener ces locomotives « Pacific Ouest 6001, 2901, 2902 », « Pacific Etat 231-011... 231-060 », « S.N.C.F 3-231B 11 dites dieppoises » et des séries suivantes tirant des wagons à marchandises multiformes (couverts avec portes coulissantes fer et bois ou tout métal... frigorifiques... tombereaux bâchés... à bogies pour bestiaux... citernes... à rangers... à trémies... plats à bords bas... etc..)?

Des sacs de sons (60 à 120 kilos), des billes de bois (grumes), du bois débité, des barriques de vin (220 litres), des sacs de pommes de terre (50 kilos), des fraises de Plougastel- Daoulas (caisses de 10 à 15 kilos), des plaques d'acier ou de fonte pour l'arsenal, du poussier de charbon, des sacs de farine sortant des Moulins de Brest (installés sur le prolongement de l'ancien 4ème bassin), du clinker, des sacs de ciments (40 kilos), des sacs destinés au sablage des bateaux en carénage, des cailloux pour les remblais...etc! Certaines motrices attendaient le retour des précédentes tellement les voies étaient saturées. Les temps ont bien changé mais les cheminots sont toujours prêts à recommencer la reconquête par le rail. Nous verrons dans toute cette manne recueillie sur le chemin de fer que malgré les volontés rien n'a pu arrêter l'érosion du trafic ferroviaire au port de commerce. « LE CHEMINOT » de 2009 espère un sursaut qui n'est pas utopique puisque notre planète polluée comme jamais devra revenir aux transports de masse pour survivre.


Les fameuses barrières des passages à niveau , les bornes kilométriques, les impressionnantes lignes régionales et départementales (voir la carte du réseau ouest ci-dessous), les distances définies par des butoirs, la réglementation des voies ferrées, la fantastique évolution technique faisant passer la vitesse de 40 km/h à 575 km/h font revivre mes trois personnages dans l'espace train de leur jeunesse ou de leur travail. Ecoutez, en entier, les interviews car complets et instructifs.


Les affres de la guerre ont perturbé la machine ferroviaire. Cependant la gare de Brest inaugurée en 1936 est restée debout malgré ses blessures. Sachons qu'elle est classée monument historique subissant, malgré tout, quelques petites modifications. Le port de commerce n'a pas été épargné comme le montre certaines photos. La nouvelle génération de cheminots est digne des anciens. Cette profession très soudée a contribué à l'image de marque des compagnies du chemin de fer. Subjectif le plan allemand de 1896 !

« La Mère Capote »

Récit d'un vécu.

La guerre, cette semeuse de haine, laisse des traces dans bien des esprits. A telle enseigne l'histoire de Mademoiselle Berthe-Marie-Caroline Bordeaux décédée en l'hospice civil de Brest en 1938 et enterrée avec un secret, sans doute chimérique, qu'elle ne pouvait ni voulait dévoiler.

Les anciens se rappellent, sûrement, cette femme silencieuse brodant inlassablement de la dentelle avec son crochet. Assise sur un banc du square Amiral Réveillière elle stoppait son travail à chaque arrivée de train. Très grande, élancée, marchant avec dignité et vêtue d'une inséparable capote de soldat, d'où la dénomination «La Mère Capote», elle dirigeait ses pas vers les quais de la gare pour attendre un fantôme qui ne venait pas. Le teint pâle, les yeux embués et masqués par son petit chapeau de toile elle s'en retournait à l'ouvrage sous les regards interrogatifs des passants. L'ombre d'un fils ou d'un amant devait, peut-être, obséder son angoissant désespoir? Nul ne le saura jamais tant son mutisme fut grand. Partie rejoindre le spectre tant désiré elle n'a heureusement pas vécu l'enfer de 1940/1945.

Texte remodelé d'articles parus sur « Les Cahiers de l'Iroise » et « La Gazette du Port » édités à Brest.

Pendant la guerre 1940/1945... le bilan...

809 cheminots fusillés, 1 157 morts en déportation, 7 000 morts sur leur lieu de travail, 16 000 blessés, 6 558 locomotives détruites, 306 000 wagons hors d'usage, 25 700 voitures voyageurs inutilisables, 2 603 ponts à rebâtir, 70 souterrains en ruines, 630 ponts majeurs anéantis, 77 dépôts de locomotives sur 400 atteints, 25 gares de triage ravagées, 2 680 000 m2 de bâtiments rasés, 19 grands ateliers à reconstituer, 4 870 km de voies abîmées, 14 000 aiguillages détruits, 28 000 km de circuits téléphonique désactivés. Ceci par les sabotages et les bombardements sur le réseau français. (sources Wiki-Brest et «Le Rail»).

Le chemin de fer a donc payé un lourd tribut dans cette folie humaine. Des peuples entiers, dont l'Allemagne, ont été ravagés. Ce texte est dédié « AU CHEMINOT » en général car quasiment tous surent souffrir ou mourir pour la liberté.

Le résistant du rail suivait un plan de sabotage défini par un PC... à savoir «Soustraire des pièces essentielles tels les réservoirs d'eau et les machines à vapeur. Rendre inutilisables les tuyères d'injecteur et les clapets d'admission ainsi que les Y (placés dessous les locomotives) de ces réservoirs d'eau». Les itinéraires avec horaires des convois ennemis étaient signalés par des «agents du rail» afin que les bombardiers amis puissent détruire ces trains... avec, malheureusement, le risque pour les cheminots d'être massacrés autant par les alliés que par les nazis. En effet les attaques fusaient par une intervention surprise, donc secrète, de ces cibles.» (sources « l'Association des anciens combattants du Chemin de Fer » et « Le Rail »).

Nous voyons, sur une photo ci-dessus, les noms des cheminots brestois morts pour leur idéal d'homme. Ce monument, en granit rose, est installé dans le hall de la gare voyageur de Brest (côté droit des portes d'accès). Ils étaient jeunes aimant la vie.


Il y a des parcours de vie étonnants. Celui-ci, pourtant, mérite une mention spéciale. Loulou Hery est un ancien cheminot, un fan de cirques (comme vous le savez si vous connaissez bien le blog), un subtil photographe évènementiel et un bon reporter... Pour preuve la vidéo ci-dessous ! Dans les pages relatant le rail vous le retrouvez perspicace et bien accompagné par des collègues pros du métier et du dire !


Alors cette fameuse voie descendant du Rody... elle vient ? La chose promise est filmée, commentée, photographiée avec passion. Merci à Alain Debray et Patrick Vandamme qui se sont mis à disposition pour nous expliquer toutes les manœuvres et réglementations afférentes au bon déroulement de l'envoi des wagons vers la gare du fret marchandise à portde. Le site est agréable à regarder avec sa verdure, sa chapelle, sa falaise. La 4 voies autoroutière nous accompagne vers la zone portuaire comme pour sceller le destin du rail.

Cette page ne serait pas si dense sans les fantastiques témoignages des CHEMINOTS, les ARCHIVES MUNICIPALES de Brest, les archives de la "REVUE DU RAIL", les archives locales de la SNCF, les archives de la CCI de Brest, les apports de mémoires de Mr. François CAVAREC, le SERVICE HISTORIQUE DE LA MARINE, les dossiers de Paul PEDEN le battant et conducteur du TGV 384, l'aide logistique de Mr. Jean-Pierre CARADEC, la BIBLIOTHEQUE d'ETUDE DE BREST, le STUDIO 29 avec la photo GERNOT parue dans SILLAGE, le relationnel avec WIKI-BREST, les vidéos et soutiens multiples de Loulou HERY (un vrai permanent du blog!!), les photos et cartes postales du GI inconnu, de GOULVEN de la Caisse à Clous à portde, de Michel POULAIN. Que toutes et tous soient remerciés et visités dans leur site respectif (moteur de recherche GOOGLE). Les textes, les vidéos et photos (non référencées), les interviews sont de Yffic Dornic. Yves Cloarec est associé à ce travail tant sa compétence et sa disponibilité sont grandes. Le 25 juin 2009.